Guatemala : le climat social est explosif
Guatemala : le climat social est explosif
Que se passe-t-il ?
D’importantes manifestations ont lieu en ce moment au Guatemala, petit pays d’Amérique centrale situé entre le Mexique et le Honduras.
Ils réclament le départ du président, conservateur Alejandro Giammattei.
Ils lui reprochent de ne pas du tout lutter contre la corruption.
Il faut savoir qu’au Guatemala, la pauvreté est forte :
-
59% de la population est touchée par la pauvreté
-
La malnutrition infantile touche la moitié des enfants de moins de cinq ans
-
La pandémie de Covid-19 a tari les envois vitaux d’argent par les immigrés vivant aux Etats-Unis, car ils sont fortement touchés par le chômage. Environ 2,7 millions de Guatémaltèques vivent aux USA.
-
Chute du tourisme, comme partout dans le monde
-
Début novembre, le Guatemala a été balayé par les pluies torrentielles du cyclone Eta, faisant plus de 150 morts et disparus dans le pays.
Le risque d’explosion sociale est donc très fort au Guatemala.
Or, dans ce contexte, le Congrès, qui est acquis au président, a voté un budget colossal, mais oublieux des pauvres.
La lutte contre la corruption est un échec
Ce budget atteint 12,8 milliards de dollars, soit une hausse de 25% par rapport à celui de 2020. Cette hausse s’explique par la volonté de lutter contre la pandémie.
Or, les fonds sont surtout destinés à des chantiers d’infrastructures confiés au secteur privé.
De nombreux Guatémaltèques pensent que cela va favoriser la corruption, car le flou règne sur les postes de dépenses.
De plus, l’endettement de la population va beaucoup augmenter.
Et les Guatémaltèques ne voient pas en quoi ce budget va lutter contre la pauvreté, la malnutrition, les inégalités, aider le système de santé ou l’éducation.
Alejandro Giammattei s’était pourtant fait élire en janvier sur la promesse de lutter contre la corruption.
D’ailleurs, son prédécesseur Jimmy Morales terminait son mandat sous le feu d’accusations de malversations après avoir promis lui aussi d’en terminer avec ce fléau.
Malgré sa promesse, le nouveau président n’a pas souhaité le retour d’experts de l’ONU : une commission destinée à lutter contre la corruption, que Jimmy Morales avait renvoyée. D’ores et déjà, Alejandro Giammattei se décrédibilisait dans sa volonté de lutter contre la corruption.
Des manifestants ont mis le feu au Parlement
Samedi, alors qu’une manifestation pacifique réclamant la démission du président se tenait à proximité du Congrès, un groupe de manifestants a mis le feu au Parlement.
Une quarantaine de personnes ont été interpelées.
Au sujet de la manifestation pacifique, des forces de l’ordre ont lancé des gaz lacrymogènes sur la foule, qui comprenait aussi des enfants.
Dimanche, des centaines de Guatémaltèques ont de nouveau manifesté.
Tandis que le président appelle au dialogue, le vice-président prend ses distances avec lui.
Il propose au président qu’ils démissionnent tous les deux.
Il demande aussi à la justice d’enquêter non seulement sur l’incendie des bureaux du Parlement mais aussi sur la répression policière.
Deux organismes américains, l’Organisation des Etats américains (OEA) et la Commission interaméricaine des droits humains sont opposés au président.
Au sujet de la poursuite des mouvements protestataires, 2 propositions à noter :
-
L’université de San Carlos appelle à une grève nationale
-
Le Comité de développement paysan (Codeca) va bloquer les routes importantes du Guatemala
La terreur des gangs
Le Guatemala est un des pays les plus violents du monde : 3.500 homicides par an, dont la moitié liés au trafic de drogue ou à la rivalité entre gangs. Les USA estiment que 90 % de la cocaïne arrivant sur son territoire transite par le Mexique et l’Amérique centrale à bord de petits avions, de bateaux ou de sous-marins.
Ces fameux « maras » avaient fait une trêve liée aux mesures restrictives prises pour lutter contre la pandémie, mais ont annoncé au mois d’août reprendre leurs activités criminelles au Honduras et au Guatemala.
Désormais, la violence se déchaîne à nouveau.
Le bilan au Guatemala (17 millions d’habitants) s’établit pour les sept premiers mois de l’année à 1.909 assassinats, contre 2.805 en 2019.
Les pays industrialisés coupables selon le président
Suite au cyclone Eta, qui a fait plus de 150 morts et disparus dans le pays, Alejandro Giammattei accuse les pays industrialisés d’être responsables des catastrophes causées par le changement climatique et qui ravagent la région.
A l’occasion d’une réunion avec son homologue du Honduras Juan Orlando Hernandez, il a exigé des pays industrialisés qu’ils “répondent” pour “les dégâts qu’ils ont causé au climat”.
Il dénonce l’abandon de l’Amérique centrale par ces mêmes pays.
Sources: AFP, ONU, Reuters, RFI